On voit de plus en plus fleurir sur les réseaux sociaux des photos et des vidéos de travail en liberté. Certaines inspirent et font rêver. D’autres m’inquiètent et me font défiler l’écran à toute vitesse pour passer à autre chose.
Outre les attitudes négatives, les chevaux automatisés ou les comportements dangereux que je peux parfois observer, une chose bien précise m’amène à scroller systématiquement : le licol sur la tête d’un cheval en “liberté”.
Bien souvent, les personnes qui laissent le licol sur la tête de leurs chevaux pour jouer en liberté ont de bonnes raisons de le faire : c’est plus facile pour elles de récupérer leur cheval à la fin de la séance ou même pendant s’il venait à avoir envie de partir… Parfois, elles agissent seulement ainsi par habitude ou parce que c’est “plus rapide”. Je dis cela sans jugement aucun et je t’avoue que cela m’est moi-même arrivé il y a de cela plusieurs années. Depuis, j’ai pris conscience de pas mal de choses que je souhaite te partager.
Si nous souhaitons établir une relation de confiance, un partenariat solide avec notre cheval, nous devons apprendre à ne pas nous comporter en prédateur et à identifier et contrôler certains comportements instinctifs primaires tels que le réflexe d’agrippement (lorsqu’on s’accroche au licol de son cheval, voir au cheval lui-même pour ne pas qu’il parte).
Ces réflexes reprennent les commandes dès lors que nous sommes sujet à une émotion telle que la peur.
C’est cette même émotion qui peut également inciter à laisser le licol sur la tête de son cheval ( Peur de perdre son cheval, peur qu’il s’en aille, peur de ne pas être capable, peur de ne pas être prêts… ). Mais plutôt que d’ignorer la cause de cette peur, pourquoi ne pas considérer ce qu’elle signifie? Peut-être ton cheval manque-t-il de préparation? Peut-être manques-tu de confiance en lui, en toi? Peut-être peux-tu améliorer la relation avec ton cheval ? Sa connexion? Ta communication ? Son implication ? …
Il est donc préférable de s’interroger et de travailler sur la cause réelle du problème plutôt que de chercher à palier à une éventuelle conséquence : la fuite ou la déconnexion du cheval.
En nous comportant en prédateur, nous incitons notre cheval à se comporter comme une proie (c’est à dire à utiliser son reflexe d’opposition ou à fuir) ce qui va à l’encontre de la raison-même pour laquelle nous souhaitons communiquer en liberté avec notre cheval : établir une relation partenaire et harmonieuse avec lui.
La liberté, ce n’est pas quelque chose qui s’improvise mais qui, au contraire, se construit … et cela commence en effet avec un licol mais aussi avec une longe!
Cela implique de travailler sur la relation, le respect, la connexion et le rappel du cheval à faible distance puis avec une longe plus grande qui te permettra de communiquer à grande distance avec un filet de sécurité. Cela nécessite également de travailler sur nous-même afin d’être suffisamment confortable pour que notre cheval ait envie de rester près de nous.
Au cours de mes coachings, j’ai aussi pu observer que certains chevaux se comportent différemment selon qu’ils ont ou pas le licol sur la tête.
Certains individus peuvent mettre du temps à comprendre qu’ils ne sont plus tenus par une longe et qu’ils ont le choix de partir ou de rester. Sans s’en rendre forcément compte, laisser le licol sur la tête de son cheval revient à le leurrer.
Je me rappelle notamment d’une de mes élèves en formation “Horseman Challenge” qui avait un cheval qui restait très attentif, connecté et ce, peu importe l’exercice proposé lorsqu’il avait encore le licol sur la tête. Mais dès lors qu’on lui retirait, il se déconnectait automatiquement pour aller brouter.
Il a fallu reconstruire tout le travail établi en “liberté”. Le licol et la longe ont été remis et nous avons posé des bases solides et réelles. Quelques semaines plus tard, les séances avaient porté leurs fruits et le couple évoluait en totale liberté.
Pour conclure, outre l’aspect relationnel, j’aimerais mettre l’accent sur les risques qui peuvent être occasionnés lorsqu’un cheval est lâché avec un licol sur la tête. Le licol éthologique notamment, s’il est plus léger et agréable à porter pour le cheval, est conçu en corde marine, capable de supporter plus d’une tonne de poids sans casser. Il ne cédera donc pas si le cheval venait à s’accrocher quelque part. Cependant, qu’il s’agisse d’un licol plat ou d’un licol en corde, les chevaux sont des animaux souples et rapides, capables de se mettre dans des situations improbables et ce, même en présence de leur cavalier. Certains d’entre vous ont pu s’en rendre compte. Aujourd’hui, les témoignages d’accidents à ce sujet sont nombreux et il ne se passe pas une semaine sans que les réseaux sociaux ne relatent un incident du genre. Je pense qu’il est de notre responsabilité d’éviter à notre cheval les mésaventures qui pourraient être liées au fait de laisser le licol sur sa tête. Retirer le licol est un geste responsable, qui ne prend que quelques secondes. Penses-y !